Le 1er novembre 1954 est la date symbole du début de la guerre d’Algérie, la dernière guerre que j’ai subie….
Une série de 6 articles.
14-18
Quand mon grand-père me racontait la Guerre de 14/18, son Chemin des Dames où il avait été gazé, les horreurs qu’il avait subies, je n’imaginais pas être un jour dans la situation où, moi aussi, je pourrai être amené à raconter mes histoires de guerre.
39-45
Septembre 1943, je suis avec ma mère, dans un tramway, à Nantes, nous allons faire des courses en ville.
Les sirènes se mettent à hurler, le tramway s’arrête. Devant nous il y a une place avec des immeubles autour. On nous dit d’aller dans les abris, dans les caves des immeubles.
Nous descendons, il fait noir, les gens se pressent les uns contre les autres.
C’est le silence, tout le monde retient son souffle.
Et puis tout à coup, un immense choc, un fracas assourdissant, ça y est une bombe vient de tomber … peut-être sur l’immeuble. Le sol en terre est comme labouré, retourné … une dame est tombée à terre, sa robe est sale. Sous mes pieds, il y a une vieille boite à biscuits, en fer, toute rouillée, qui est ressortie par le choc. Il y a de la fumée, des hurlements. Ma mère me serre contre elle.
Et puis le temps s’arrête, les bombes continuent à tomber … Une éternité. Quand est-ce que ça va s’arrêter.
Et ça s’arrête enfin, après un temps infini.
Des ombres nous disent avec autorité qu’on peut sortir. Nous avançons à tâtons, je devine la lumière du jour au bout d’un couloir (?) , à travers la fumée. Il y a des flammes, des tas de gravats.
Ma mère cache ma tête sous son manteau.
Mais j’aperçois quand même des cadavres, des montagnes de bois éclaté, de pierres et de poussière qui vole. De temps en temps, j’aperçois une jambe (?) qui dépasse, du sang, beaucoup de sang, des morceaux de ce que crois être des biftecks, comme chez le boucher.
Nous avançons péniblement, je ne sais pas où nous allons. Ma mère essaie toujours de cacher mon visage, mais je vois quand même autour à chaque pas.
Nous marchons très longtemps comme ça, je ne sais pas combien de temps. Le soir tombe, il y a des grandes flammes partout, ça sent le brûlé, et toujours des montagnes de pierres qu’il faut escalader.
On entend des camions de pompiers, très loin, tous les bruits sont sourds, je n’entends pas bien ce que dit ma mère.
Ensuite, dans ma tête, il y a un grand vide. Je suis dans un jardin, devant un tas de sable.Avec moi il y a une petite fille, une voisine?
Dans le garage, il y a une belle voiture noire, sur cales. J’ai le droit de monter dedans. Je joue à conduire.
Cette guerre là se terminera chez mes grands-parents, à la campagne, quand les FFI arriveront après que les Allemands aient quitté le village.
(à suivre)