pour rêver

En ce lundi du mois d’août, loin des salons et des livres…
Accordez une minute de lecture pour cette histoire très courte de Cassiopée Weeger chez Short Editions, l’éditeur propulseur de littérature courte…
« Une femme, au lourd manteau sombre, déambule dans les rues de Nantes depuis plusieurs heures. Son corps tremble et semble de plus en plus capricieux au moindre déplacement. Le soleil s’est couché depuis peu et a laissé place à une pénible obscurité, qui fait fuir les derniers passants vers leurs confortables et chaleureux logis. La femme repère enfin un endroit pour s’asseoir, le long du gigantesque mur blanc d’un magasin. Elle pose difficilement ses genoux à terre, puis se retourne, les mains sur le sol pour ne pas vaciller. Elle s’adosse au mur et resserre son manteau sur son torse. Après quelques minutes dans la même position, elle plonge sa main dans sa poche et en ressort une petite brioche ronde et dorée, parementée de généreux cristaux de sucre. Son visage s’illumine à la vue de cette appétissante viennoiserie. Elle en déchire un morceau et l’amène à sa bouche aux lèvres gercées par le froid, pour le poser délicatement sur sa langue. Ses yeux se ferment pour mieux apprécier ce pur instant de délectation. Afin de prolonger ce moment, elle ne mâche pas mais laisse le morceau de brioche fondre délicieusement dans sa bouche. Elle rouvre les yeux et s’apprête à détacher un deuxième fragment de délices. Elle pousse un léger chuintement de surprise à la vue d’une brioche complètement intacte, à la rondeur parfaite, dans sa main. Elle se frotte maladroitement les yeux, puis tourne la brioche dans tous les sens, mais rien n’y fait, celle-ci est toujours inentamée, sans la moindre trace d’une quelconque lippée. Prise d’une profonde incompréhension, la femme regarde autour d’elle, à la recherche, peut-être, d’une ombre taquine aux tours de magie farfelus. Mais la rue est complètement vide, personne ne peut être en train de jouer avec les nerfs de la pauvre vagabonde. Poussée par la curiosité, elle croque ardemment dans la brioche, puis regarde précipitamment l’objet de ses troubles. Cette dernière est encore une fois complètement intacte. La femme laisse son regard dériver entre la brioche et la rue, soudainement perdue dans ses pensées. Après plusieurs longues minutes sans oser bouger, elle lève les yeux au ciel et lui murmure quelques mots inaudibles, puis croque ensuite à pleine bouche le gâteau aux attributs surnaturels. Elle ferme une nouvelle fois les yeux, détend son corps frigorifié, et esquisse un dernier sourire de ravissement. »

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